LVMH a acquis dans la région de Toro il y a quelques mois un domaine d’exception. Depuis, l’engouement pour ce micro-terroir exceptionnel du Douro espagnol intéresse tous les cadors de la vinification. Visite-éclair en compagnie du plus passionné d’entre eux : Bernard Magrez.

UN TERROIR

Comme le dit un « Francès » installé sur place (Anthony Terryn, voir ci-dessous), Toro est un « petit bout de Bourgogne en Espagne ». Il s’agit d’un vignoble de qualitéexceptionnelle : 2 700 hectares perdusen pleine frontière ouest de Castilla y Léon (près de la frontière nord du Portugal). Ce terroir très réputé – mais méconnu – permet de produire sur les bords du Douro (oui, le même fleuve que pour le Porto) des vins riches, structurés, d’une puissance inégalée. Leur réputation remonte à la conquête des Amériques, quand un certain Christophe Colomb en emporta quelques tonneaux à bord de la Santa Maria.

 

UN CÉPAGE

Ce raisin (cousin du tempranillo) est emblématique de la région. Il pousse sur des ceps de cinquante à cent ans ayant résisté au phylloxéra. Les vignes, d’un diamètre impressionnant, sont taillées pour résister à l’extrême aridité locale (laquelle, rappelons-le, permet de produire de grands vins). Les vins de Toro, ça ne se boit pas, ça se mâche… Pas étonnant que nombre de domaines réputés de Rioja, Ribera ou Rueda se soient installés sur place, à l’image du célébrissime Vega Sicilia.

 

À L’AFFICHE

Trois stars du vignoble français ont déjà posé leurs valises à Toro : Pierre Lurton, directeur d’Yquem et de Cheval Blanc (Estates & Wines, groupe LVMH, Bodega Numanthia), et Bernard Magrez, propriétaire notamment de Pape-Clément (voir ci-contre), associé avec son ami Gérard Depardieu. Mais il faut aussi compter avec la bodega d’autres membres de la famille Lurton : Jacques & François Lurton (Bodega Campo Eliseo), associés avec le wine-maker Michel Rolland. Ainsi que sur le trublion de l’étape, Anthony Terryn, et sa propriété Dominio del Bendito. Moult directeurs techniques et autres maîtres de chai venus de Bordeaux ou du Languedoc vinifi ent également dans l’étrange territoire de Toro. L’un d’eux, Xavier Itturia, vient de créer sa bodega : Bodega Itturia.

 

EMBEDDED WITH BERNARD MAGREZ

Sur le tarmac du Bourget, le Falcon 50 est prêt à décoller. Bernard Magrez arbore un large sourire sous son élégante mèche argentée. Le teint hâlé, l’homme d’affaires se lève pour vous accueillir. Il est intarissable quand il s’agit de parcourir au pas de course l’une de ses propriétés viticoles. En moins de dix ans, il a constitué un véritable empire. A la tête d’une quarantaine de domaines en France, en Europe et en Amérique du Sud, il vend plus de 10 millions de cols pour un chiffre d’affaires estimé à 45 millions d’euros. A l’origine, il a fait fortune dans la distribution de spiritueux et de vins. Devenu un véritable flying wine doctor, il passe aujourd’hui le plus clair de son temps à l’obscurcir, entre Japon, Maroc, Collioure, Bordeaux – où sont ses fleurons Pape Clément, Fombrauge et La Tour Carnet –, Argentine… ou encore Espagne, comme ici, à Toro, en pleine Castille. Aux environs de Valladolid, des parcelles agricoles grillées par le soleil. Des éoliennes, des panneaux solaires. Toro est encore à une heure de route. Sur la place, un ancien couvent est devenu une winery. Deux jeunes femmes accortes font déguster des vins puissants, concentrés, épicés. L’avenir ? Magrez l’évoque sur le vol du retour. Ce soir à Bordeaux, demain à Venise, travaillant dans son jet entre deux visites de vignobles. Son futur, il le voit aussi rosé que le vin qu’il vient d’acquérir en Provence, le clos des Muraires, au Luc.