Dans sa dernière oeuvre, l’impénétrable « Melancholia », Lars Von Trier fait se consumer une famille à la veille d’une catastrophe planétaire. Cataclysme que le réalisateur a vécu à moindre échelle, personnellement et en direct à Cannes, après une potacherie très mal digérée par un parterre de journalistes médusés. Rencontre avec une idole cramée.

 

CAMPING-CAR

« Si je ne me déplace qu’en camping car, c’est bien parce que c’est l’unique moyen de locomotion que je supporte. Ça me permet de découvrir de nouveaux restaurants, de beaux hôtels… Et puis, j’ai mon assistant qui est au volant. Je l’appelle ma « chienne ». Je passe mon temps à l’engueuler. Une relation assez masochiste… »

MELANCHOLIA

« J’ai des doutes au sujet du résultat de Melancholia. Cela tient au fait que dans le film, on frôle, à mon avis, l’esthétisme publicitaire. Alors, je pense à Visconti. Dans son cinéma aussi, il y a de jolies choses à voir. »

FIN DU MONDE

« Notre monde est en train de disparaître. Mais ce qui me fascine par-dessus tout, c’est que j’ai le sentiment que nous sommes seuls dans l’univers. Pas la moindre bactérie ailleurs. Et il faut continuer à vivre avec ça. »

DIEU

« J’ai parlé à un prêtre il y a peu. Je lui ai dit : “Si nous sommes la création de Dieu, alors, il a fait un boulot de merde.” Tant de souffrances, de misères, de terreur… Et personne pour agir contre ça. Il m’a répondu que j’entrevoyais Dieu comme un marionnettiste. J’étais naïf. L’idée de Dieu devient beaucoup plus intéressante lorsqu’on ne le considère plus comme “quelqu’un” ayant le contrôle sur tout. »

DERNIÈRE HEURE

« Finalement, je suis une personne assez lâche. Je n’imagine pas affronter la fin du monde comme les personnages du film. Moi, ce que je souhaiterais, c’est qu’on me tire une balle dans la tête, par derrière, sans prévenir. Ça risque peut-être d’arriver désormais. Rappelez-moi, Israël fabrique bien les Uzi ? »

DISTANCE

« J’ai le souvenir de longues discussions avec Gilles Jacob, qui est un homme brillant, et aussi avec Thierry [Frémaux, NDLR]. Nous avons longtemps eu une relation privilégiée et elle va beaucoup me manquer, vu que je n’ai plus, d’après ce qu’on m’a dit, le droit d’approcher le Palais des festivals à moins de 100 m. Mais le côté positif de cette affaire, de ce non-sens total, de ces plaisanteries faites à de mauvaises personnes, c’est que malgré le tort qu’elle va me porter d’un point de vue économique, à ma société de production surtout qui est déjà dans la merde, c’est qu’aujourd’hui je me sens libéré. Peut-être, au fond, n’est-ce pas si bien que cela d’être sélectionné à Cannes… »

TREMBLEMENTS

« Mes mains tremblent à cause des médicaments que je prends. Et aussi à cause de l’alcool. J’ai pas mal picolé sur le tournage de Melancholia. Alors, quand je mélange les deux, j’en arrive à un point où je suis incapable d’avaler mon petit-déjeuner. Mais ça ne me dérange plus trop. Ça fait dix ans que je vis ça. Je m’y suis habitué. »

FUCK

[A propos du « Fuck » tatoué sur les phalanges de sa main droite] « Moi, je ne veux baiser personne ! J’ai vu ça sur l’un des personnages de The Indian Runner, de Sean Penn. J’ai tout de suite dit à ma femme : “Il me faut un tatouage comme celui-là !” Mais je le trouve un peu trop propre. Il aurait fallu le faire comme en prison : avec une aiguille et de l’encre. »

Melancholia, de Lars Von Trier, avec Kirsten Dunst, Charlotte Gainsbourg.

Sortie le 17 août.