Il n’y a pas que le foot dans la vie. En France, entre tennis et basket, natation et cyclisme, judo et golf, chacun essaie de se frayer un passage. Les autres récoltent les miettes, se contentent de niches, d’euphories passagères. Zoom sur ces sports non identifiés qui refusent d’abdiquer devant la fatalité.

Tout arrive. Le 29 septembre, à 20 h 45, France 4 a diffusé la première rencontre de l’histoire de la Divison 1 de football féminin. Lyon, vainqueur de la Ligue des champions, a laminé son voisin de Saint-Etienne (7-0). La chaîne surfait ainsi sur l’engouement récent pour les Bleues du sélectionneur Bruno Bini, quatrièmes du Mondial en juillet en Allemagne et pourvoyeuses d’audiences effi caces sur Direct 8. Si la couverture médiatique s’intensifie de façon méritoire et méritée, ne jamais oublier que, le 9 mars, lors d’un tournoi amical à Chypre, ces mêmes joueuses de l’équipe de France avaient dominé l’Ecosse devant 23 spectateurs seulement ! Savoir faire lever et vibrer les foules est un métier, cruel et ingrat car injuste. Sans logique cartésienne. Cette réalité frappe de nombreuses autres disciplines. Et, sans exposition, point de salut, hélas ! Le football écrase tout. Knysna, fiasco tricolore en Afrique du Sud, a provoqué des dégâts. Mais le ballon rond demeure le sport roi, suivi par le rugby, qui a réussi son implantation. Derrière, même le hand-ball souffre.La bande à Karabatic a eu beau remporter, le 31 janvier, un quatrième titre mondial, ce sport de main n’est quasiment jamais diffusé. Question de culture ? Pas seulement. Ce serait trop simple. Pendant ce temps-là, l’aviron, le curling, le football américain, le hockey sur gazon ou le cricket traînent leur mal-être. A la recherche de licenciés, de partenaires, de moyens, de reconnaissance. « Sortir de la confidentialité est extrêmement difficile. On fait ce qu’on peut, déplore Didier Gailhaguet, président de la Fédération des sports de glace, qui rassemble dix disciplines, dont huit sont olympiques. Et pourtant, cette année, on a remporté 36 médailles aux championnats d’Europe ou du monde, un record. Ce ne sont pas des médailles de saucisson ou de reblochon, tout de même ! Bénéfi cier d’aussi peu de soutien, notamment de l’Etat, a de quoi rendre irritable. »

 

 LE CRICKET VEUT SA REVANCHE

Sport national en Inde ou au Pakistan, ultra-populaire en Angleterre, en Australie, en Afrique du Sud et dans tous les pays du Commonwealth, le cricket existe à peine en France. Sa fédération dépend de celle du baseball et du softball ! Il y a moins de 1 000 joueurs licenciés, pour 40 clubs affi liés susceptibles de vous accueillir. Compte tenu de la surface nécessaire pour être pratiqué, il s’y déroule surtout, pour la région parisienne, dans les bois de Boulogne et de Vincennes. L’association France Cricket, sous l’impulsion de Tony Banton, président du club de Lille, organise ce sport dans l’Hexagone. Le Franco-Britannique ne ménage pas ses efforts pour s’émanciper. Ce serait un juste retour des choses : c’est en France que l’on trouve la plus ancienne trace écrite liée au cricket. En effet, en 1478, au Château de Liettres près de Saint-Omer, dans le Pas-de-Calais, une lettre de doléances adressée au roi narrait une rixe autour d’une partie ! En 1900, lors des Jeux olympiques de Paris, la France remporte la médaille d’argent mais surtout grâce à son contingent de Britanniques sévissant dans les hôtels et ambassades. Une revanche contre la Grande-Bretagne est prévue avant les JO de Londres 2012 ! Une occasion unique de relancer la pratique chez nous de ce sport, porté par l’immigration du sous-continent indien.

 

LE CURLING BALAIE DEVANT SA PORTE

Les plus méprisants, et ils sont nombreux, l’appellent la pétanque de glace. Pourtant, placer les lourdes (20 kilos) pierres en granit poli le plus près possible de la cible dessinée sur glace et appelée « maison » est plus complexe, moins pâté-cornichon aussi, que lancer le cochonnet. Inventé au XVIe siècle en Ecosse, où il se pratiquait sur les lacs gelés le dimanche par les paysans, le curling est olympique depuis 1998. Malgré seulement 500 licenciés et 18 clubs recensés, la France se débrouille très honorablement : cinquième des derniers mondiaux, septième aux JO de Vancouver en 2010. Le tout sans installation spécifique, seuls Megève, Pralognan et Saint-Gervais possédant une piste de glace, 42 m de long pour 4,75 de large. Adresse, stratégie, fi nesse et concentration sont nécessaires durant les trois heures que peuvent durer une partie, où deux équipes de quatre joueurs s’affrontent. Le must est sans doute lorsque les partenaires du lanceur, aussi appelé « skip », balaient la glace devant la pierre, l’échauffant pour accélérer ou ralentir la pierre. Le plus vieux pratiquant français a 83 ans ! « Les biathlètes bénéficient de 40 contrats avec les douanes. Les curleurs n’ont pas cette chance et ils sont pourtant tout aussi valeureux. Je n’ai malheureusement pas les moyens de leur donner ce à quoi ils ont le droit, regrette Didier Gailhaguet, président de la Fédération des sports de glace et ses 32 000 licenciés. Il n’y a pas de génération spontanée, seulement beaucoup de travail, malgré un manque de structures. Obtenir les Jeux d’Annecy en 2018 ne pourrait être que bénéfique. »

 

LE HOCKEY SUR GAZON CHERCHE DES CROSSES

La discipline est olympique depuis 1908 pour les garçons, 1980 pour les fi lles. En France, 15 000 licenciés répartis dans 150 clubs s’ébrouent à onze contre onze sur un terrain synthétique mouillé (six contre six pour le hockey en salle, dans un gymnase sur un terrain de handball), équipés de leur crosse, fidèle à la plus ancienne représentation du hockey, sur une fresque tombale de la vallée du Nil datant de 4 000 ans avant J.-C. Attention à la balle, qui pèse entre 156 et 163 g ! Au gardien de but, qui utilise casque, plastron, coquille, guêtres, coudières, sabots et gants, de la stopper. Si l’Inde a dominé la discipline trois décennies durant, le règne, aujourd’hui, chez les hommes, se partage entre l’Australie, le Pakistan, les Pays-Bas, l’Espagne et l’Angleterre. La France ? Pas terrible. Sa seule performance remonte à 1992, avec la qualification pour le Champions Trophy, sanctionné de la dernière place, avec sept défaites en autant de matchs. Mais il y a du mieux, sous l’impulsion d’un sélectionneur australien : les Bleus sont désormais la cinquième nation européenne, la quinzième mondiale.

 

LES BÉNÉVOLES DU FOOTBALL AMÉRICAIN

Et dire que, lors de son passage par le club des Galaxy de Francfort, Marc-Angelo Soumah (voir encadré) a joué à domicile devant 35 000 spectateurs de moyenne. Le rugby n’existant pas en Allemagne, le football américain a occupé l’espace. Désormais président de la fédération française, Soumah a bien cerné la problématique de sa discipline chez nous : une économie de sport amateur et une pratique de haut niveau. Basé autant sur la puissance physique que la science tactique, le football américain est un jeu de gagne-terrain. Onze joueurs contre onze, attaque contre défense. Objectif : progresser vers la zone adverse, parcourir des yards (10 yards équivaut à 9,10 m). Marquer un touch down, soit franchir l’en-but avec le ballon, rapporte six points. Les contacts entre joueurs sont réglementés. Que le meilleur gagne, le long de quatre quarts temps de douze minutes. La fi nale du championnat de France récompensera le vainqueur du Casque de Diamant, le 18 juin à Charléty. Oubliez les fastes du Superbowl, événement sportif le plus regardé aux Etats-Unis, le bénévolat est souvent la règle en France.