Style Le 03/11/2015 par weboptimum

7 créateurs à la fois chefs entreprises

Qu’ils soient Parisiens, Londoniens ou New-Yorkais, tous ont en commun d’être des chefs d’entreprise avant d’être des créateurs de mode. Courageux, optimistes, visionnaires, ils font partie de cette nouvelle génération tendance « profil bas » (low profile en VO), qui préfère le terrain aux podiums, et l’aventure personnelle au confort des grands groupes. Un challenge relevé haut la main puisque leur petite entreprise tourne aujourd’hui à plein régime, et en toute indépendance.

Par Anne Gaffié

 

 

Armando Cabral, fondateur de la marque Armando Cabral

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Avez-vous conscience de faire partie d’une nouvelle génération d’entrepreneurs, plutôt discrets, pour qui la mode est un vrai business ?
Tout à fait. Notre génération a probablement une prédisposition à entreprendre vite et bien, à plus forte raison dans ce domaine dynamique, ludique et créatif.

Quand et comment avez-vous démarré ?
En 2009, poussé par ma passion. J’avais depuis longtemps l’idée de créer une nouvelle marque de chaussures. Je me suis entouré des bonnes personnes, Rucky Zambrano, ancien directeur de création des accessoires Hugo Boss, avec qui j’ai développé l’ADN de la marque, et Simon Foxton, qui m’a aidé à la création et à l’identité visuelle.

Avec quelle mise de départ, et d’où venait l’argent ?
J’ai investi 500 000 $ de ma poche, sur trois ans, pour soutenir l’entreprise avant qu’elle ne commence à être rentable.

Avez-vous une/des boutique(s) en nom propre ?
Notre boutique au Koweït, dans le prestigieux mall Arraya. D’autres projets sont en cours.

Avez-vous ouvert votre business à des investisseurs extérieurs ?
Oui, nous venons d’ouvrir notre premier tour de table.

Votre priorité stratégique ?

Optimiser notre distribution au niveau mondial et dans les meilleurs points de vente. Nous n’en sommes plus très loin.

La façon dont vous pouvez améliorer votre business ?
Nous sommes encore une petite entreprise, et parfois pas assez nombreux pour suivre le rythme.


Christopher Raeburn, fondateur de la marque Christopher Raeburn

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Avez-vous conscience de faire partie d’une nouvelle génération d’entrepreneurs, plutôt discrets, pour qui la mode est un vrai business ?
Absolument. Le monde change : on sort de l’université avec de nouvelles priorités, dont celle impérieuse de rembourser ses dettes ! On m’a décrit comme un « creative entrepreneur » et l’idée ne m’a pas déplu, bien au contraire.

Votre expérience passée ?

Diplômé du Royal College of Art en 2006, j’ai bossé en free lance pour différents créateurs, avant de monter ma boîte en 2009, avec une première collection capsule réalisée à partir de toiles de parachute vintage. Ensuite, ça a été très vite.

Quelle fut l’idée de départ ?
Recycler, retravailler des produits devenus obsolètes, militaires notamment. « Remade in England » est très vite devenu la baseline de la marque.

Quand et comment avez-vous démarré ?
Mon sujet de fin d’études portait déjà sur les matières recyclées. Mais c’est la deuxième saison
de la marque, présentée lors de la London Fashion Week, qui a été décisive : nous venions d’être reconnus par les professionnels.

Avec quelle mise de départ, et d’où venait l’argent ?
Mes boulots free lance m’ont autorisé à être indépendant dès le départ, puis mes collab’ régulières avec différentes marques (Moncler, Victorinox, Barbour, Fred Perry, Rapha) ont permis à l’entreprise de grandir.

Les points de vente dont vous êtes le plus fier ?
Tous, parce qu’ils m’ont fait confiance. Une soixantaine à travers le monde.

Chiffre d’affaires annuel ?
Toujours petit !

Comment imaginez-vous votre entreprise dans dix ans ?
Etendre notre philosophie au retail, à d’autres catégories de produits, et à des partenariats avec d’autres marques.

Le meilleur compliment que vous ayez entendu ?
Le fait que nous courrions notre propre course. Sans nous soucier de ce qui se passe autour de nous ni des idées préconçues sur ce que doit ou non être la mode.

Votre priorité stratégique ?
Maintenir une cohésion de la marque sur les cinq années à venir, entre l’homme, la femme, et les accessoires, sans perdre notre âme.


Morgan Collett, co-fondateur de Saturdays NYC

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Votre expérience passée ?
J’ai grandi à Newport Beach, au bord de la mer, avec les sports de glisse. Diplômé en business et marketing, j’ai commencé à bosser pour J.Lindeberg puis Acne, dont j’ai dirigé le marché nord-américain pendant deux ans. En 2009, à 25 ans, j’ai décidé de monter ma marque, avec mes deux associés, Josh Rosen and Colin Tunstall.

Quelle fut l’idée de départ ?
Combler un vide dans le paysage mode new-yorkais. Nous savions ce que nous voulions : un univers issu du lifestyle de la glisse.

Quand et comment avez-vous démarré ?
En quatre-cinq conversations, le concept était défini. Au même moment, on nous a proposé un pas-de-porte sur Crosby Street, notre rue préférée. Nous avons pris ça pour un signe du destin !

Avec quelle mise de départ, et d’où venait l’argent ?
Avec nos cartes bancaires perso ! Et ce qu’il y avait sur nos comptes. Nous n’avions pas plus de 60 000 $.

L’organigramme de votre entreprise ?
Très flou. Nous étions sur tous les fronts. Il s’est peu à peu structuré autour de nous trois : Colin à la création, Josh aux opérations, et moi à la direction.

Avez-vous une/des boutique(s) en nom propre ?
Oui, à New York et au Japon.

Avez-vous ouvert votre business à des investisseurs extérieurs ?
Nous n’en avons pas l’intention.

Comment imaginez-vous votre entreprise dans dix ans ?

Comme un label de qualité et d’innovation, qui rassemblerait une large communauté.

La façon dont vous pouvez améliorer votre business ?
En peaufinant la recherche-développement, autour des nouvelles technologies et de l’écologie.


Isaac Reina, fondateur de la marque Isaac Reina

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En quelques mots, votre parcours professionnel, votre expérience passée ?
J’ai étudié la mode et l’architecture à Barcelone, avant de travailler aux côtés de Véronique Nichanian pendant sept ans chez Hermès, au studio homme. J’ai créé ma marque en 2006, tout en étant consultant pour différentes marques dont Maison Martin Margiela.

Quelle fut l’idée de départ, le concept ?
La création et l’édition en nom propre d’accessoires pour hommes.

Quand et comment avez-vous démarré ?
En 2006, avec l’envie personnelle de me « challenger ». Monter ma propre affaire, sans
la protection et l’aval d’une grande marque, et m’essayer à autre chose que le vêtement.

Avec quelle mise de départ, et d’où venait l’argent ?
150 000 €, en vendant l’appartement que nous avions à Barcelone.

L’organigramme de votre entreprise ?
Nous sommes six aux postes clés de l’entreprise – production, commercial, boutique, administratif, assistant style et moi-même aux commandes. Plus quatre à l’atelier indépendant que l’on vient de créer.

Avez-vous une/des boutique(s) en nom propre ?
Oui, au 38, rue de Sévigné dans le Marais, et ce depuis le début. La façon la plus radicale pour nous d’installer la marque.

Chiffre d’affaires annuel ?
900 000 euros hors marge en 2014.

Avez-vous déjà ouvert votre business à des investisseurs extérieurs ?
Pas encore, malgré pas mal de propositions. Je me demande souvent comment c’est possible ! C’est parfois difficile de tout gérer, mais j’arrive à m’en sortir seul et le résultat est positif. 

Comment imaginez-vous votre entreprise dans dix ans ?
Idéalement avec un réseau de boutiques en nom propre, rive gauche, en province, et à l’international.
Et de nouveaux produits, comme des objets et des meubles, sur lesquels je travaille depuis un bon moment déjà.

Le meilleur compliment que vous ayez entendu ?
Les meilleurs sont affectifs. Le cuir est une matière qui attise les passions. Sur mon entreprise, j’aime entendre parler d’audace et de liberté, de travail bien fait, de simplicité, de rigueur. Et que tout ça sent bon (le cuir).

Votre priorité stratégique du moment ?
Développer le produit au quotidien, l’image, la communication, l’e-shop. Et surtout consolider notre système de production, qui était jusqu’à il y a peu notre talon d’Achille.

La façon dont vous pouvez encore améliorer votre business ?
En fait, tout dépend de nous. De notre capacité à surprendre, à créer de nouveaux besoins
et de nouvelles envies que nous ne soupçonnons pas encore.


Pierre Mahéo, fondateur d’Officine Generale

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Avez-vous conscience de faire partie d’une nouvelle génération de jeunes entrepreneurs,
plutôt discrets, pour qui la mode est un vrai business ?
Je n’aurais pas eu autant de force et de volonté si j’avais créé une pâte dentaire.

Votre expérience passée ?
J’ai tout appris sur le tas. D’abord la coupe et les matières chez un tailleur parisien, puis en Italie les spécificités des différents types de lavage, des matières techniques, du cuir. 

Quelle fut l’idée de départ, le concept, que vous vouliez avant tout faire passer et proposer ?
Faire des habits qui me plaisent, que j’aie envie de porter. Etre intransigeant, surtout sur la qualité des tissus et leur origine, en offrant ce qui se fait de mieux au prix le plus juste. Avoir une proposition réaliste,
et enfin fabriquer 100 % de mes produits dans la « Vieille Europe » (Portugal, Italie, Angleterre).

Quand et comment avez-vous démarré, le point de départ ?
J’ai arrêté un job que je ne supportais plus et qui me rendait malheureux, en juin 2011. Trois mois plus tard, je commençais à travailler sur le concept d’Officine Generale. J’ai présenté ma première collection en janvier 2012.

Avec quelle mise de départ, et d’où venait l’argent ?
J’ai financé seul la première collection. Puis mes beaux-parents m’ont prêté 40 000 € pour sa production. Et pendant presque deux ans, ma femme a assuré notre train de vie, pour me permettre de réinvestir tous les bénéfices que je pouvais dégager. Sans elle, à tous points de vue, je n’aurais pas tenu.

L’organigramme de votre entreprise ?
Une directrice financière, un incroyable étudiant qui, à la fin de ses études, va me rejoindre définitivement, une personne qui m’aide à l’illustration et au suivi de la production, un responsable de magasin. Une structure très légère, mais qui va se renforcer dans les mois à venir.

Les points de vente de votre marque dont vous êtes le plus fier ?
Antonia à Milan, une des plus belles boutiques au monde, Le Bon Marché à Paris, Bergdorf Goodman à New York, Just One Eye à L.A. et son exubérante sélection.

Avez-vous une/des boutique(s) en nom propre ?
Une boutique à Saint-Germain-des-Prés – 6, rue du Dragon. La prochaine est dans les cartons.

Chiffre d’affaires annuel ?
Il double chaque année.

Avez-vous déjà ouvert votre business à des investisseurs extérieurs ?
Pas encore.

Comment imaginez-vous votre entreprise dans dix ans ?
Structurée, avec un développement retail en propre sur plusieurs continents. Et j’espère moins dépendante de moi !

Le meilleur compliment que vous ayez entendu ?
« T’aurais pas pu faire mieux en si peu de temps ».

Votre priorité stratégique du moment ?
Process, process, et process, afin de préparer la seconde partie de mon développement.


Franck Malègue, fondateur de la marque éclectic

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Avez-vous conscience de faire partie d’une nouvelle génération d’entrepreneurs, plutôt discrets, pour qui la mode est un vrai business ?
Complètement. Une nouvelle vague d’entrepreneurs qui se consacrent au développement de leur marque loin des podiums. La création d’une marque demande une alchimie subtile de compétence, d’intuition
et d’émotion.

Votre expérience passée ?
J’ai un parcours de vie plutôt qu’un parcours professionnel ! Aux quatre coins du monde, pendant vingt ans, j’ai développé des marques à forte valeur créative, dans les cosmétiques, le parfum, la mode. Cela m’a apporté des compétences à 360° et une vision cosmopolite très utile aujourd’hui. 

Quelle fut l’idée de départ, le concept, que vous vouliez avant tout faire passer et proposer ?
J’avais envie de revaloriser l’héritage artisanal européen, tout en faisant un business du XXIe siècle. En combinant le savoir-faire du maître tailleur à des tissus high-tech, issus du sportswear. J’ai commencé par la veste de ville, le manteau, et je lance actuellement une première ligne de sacs.

Quand et comment avez-vous démarré, le point de départ ?
Plusieurs rencontres m’ont amené en Vénétie où j’ai passé dix-huit mois à m’initier au métier de maître tailleur. Simultanément, j’ai collaboré avec un studio de design spécialisé dans l’usage de matériaux composites et de fibres high-tech pour l’architecture, le design d’objets et le vêtement pour sports extrêmes.

Avec quelle mise de départ, et d’où venait l’argent ?
200 000 €, de « friends & family ».

L’organigramme de votre entreprise ?
Je crois en un développement organique où tout le monde grandit avec le projet. Chacun de mes collaborateurs a été recruté pour une compétence particulière, mais accepte une polyvalence qui évolue
en fonction de ses aspirations et des besoins de l’entreprise. Je veux garder un processus de décision court et une intégration maximale de la production à la vente. Je consacre moi-même énormément de temps aux ateliers de fabrication en Italie, ainsi qu’aux boutiques.

Les points de vente dont vous êtes le plus fier ?
Ma boutique parisienne du 8, rue Charlot. Plus qu’un point de vente, c’est un lieu de travail et de rencontre. C’est ici que tout est pensé et réalisé, excepté la production.

Avez-vous une/des boutique(s) en nom propre ?
A l’exception du marché japonais où nous fournissons plusieurs grands magasins et multimarques, nous vendons exclusivement en nom propre. A Paris rue Charlot et en concession au Bon Marché. Nous ouvrons prochainement à New York dans Soho, puis à Londres.

Chiffre d’affaires annuel ?
Confidentiel. Avec une croissance à trois chiffres !

Comment imaginez-vous votre entreprise dans dix ans ?
Une entreprise internationalisée mais à taille humaine, avec des processus de décision courts et un minimum de collaborateurs.


Gildas Loaëc, cofondateur de la marque Maison Kitsuné

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Avez-vous conscience de faire partie d’une nouvelle génération d’entrepreneurs, plutôt discrets, pour qui la mode est un vrai business ?
C’est surtout une génération très douée pour s’inventer des métiers sur mesure, et ainsi faire ce qui lui plaît : développer une entreprise, designer une marque forte, toucher au créatif et à l’artistique. J’aime passer d’un domaine à l’autre : la mode, la musique, ou plus récemment la restauration, avec nos Café Kitsuné.

Votre expérience passée ?
Très jeune, vers 20 ans, j’ai ouvert mon premier commerce avec une petite boutique de vinyles pour DJ « Street Sound », dans le quartier du Louvre. Puis j’ai eu la chance de travailler une dizaine d’années aux cotés de Daft Punk, avec qui j’ai appris l’importance du style, de la direction artistique et du marketing. Parallèlement, en 2002, j’ai créé l’entreprise Kitsuné avec mon partenaire Masaya Kuroki.

Quelle fut l’idée de départ ?
Nous voulions créer une structure inédite, combinant label musical et marque de mode, avec un ADN franco-japonais fort, et un souci de qualité.

Quand et comment avez-vous démarré ?
Par un voyage à Tokyo ! Pour la production d’un film de Daft Punk, j’y avais emmené Masaya qui me servait de guide sur place. Il m’a fait découvrir un monde que je ne connaissais pas, où mode, design, café, musique se télescopent dans des boutiques lifestyle. Nous y avons vu des opportunités et nous nous sommes lancés.

Avec quelle mise de départ, et d’où venait l’argent ?
3 500 € en poche chacun ! Aucun capital de départ, mais beaucoup d’envie.

L’organigramme de votre entreprise ?
Nous avons commencé à deux avec Masaya. Nous faisions tout. Jusqu’aux DJ le soir pour financer notre entreprise ! Nous avons beaucoup voyagé, regardé autour de nous, « réseauté ». Aujourd’hui, nous sommes plus de 70. Une directrice générale, un directeur financier, commercial, marketing, logistique. Avec une moyenne d’âge très jeune.

Les points de vente dont vous êtes le plus fier ?
10 Corso Como à Séoul, Storm à Copenhague, Dover Street Market à Tokyo, Lane Crawford à Shanghai, La Rinascente à Milan, Net à Porter, Mr Porter, Le Bon Marché, Colette, les Galeries Lafayette…

Avez-vous une/des boutique(s) en nom propre ?
A Paris, la quatrième ouvre en avril ; à Tokyo, la troisième est en construction ; à New York, la seconde est en travaux. Pour cet été : une première boutique à Hong Kong, deux Café Kitsuné à Paris, un à Tokyo et bientôt un autre à Fukuoka !

Chiffre d’affaires annuel ?

Environ 20 millions d’euros.

Avez-vous ouvert votre business à des investisseurs extérieurs ?
Non, mais nous n’y sommes pas opposés.

Comment imaginez-vous votre entreprise dans dix ans ?
Encore plus d’adresses dans le monde. Et de tubes sur les ondes !

Votre priorité stratégique ?
Paris ! Il faut être fort sur sa base.

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