Entertainment Le 16/11/2015 par La rédaction

Matthew McConaughey, l’acteur qui s’est réinventé

Rarement aura-t-on vu à Hollywood un retour aussi fracassant que celui de Matthew McConaughey. Le comédien texan, révélé par John Sayles et Joel Schumacher à la fin des années 1990, s’était ensuite égaré dans des comédies à l’eau de rose rentables et aujourd’hui oubliées. Oscarisé pour son rôle dans « Dallas Buyers Club », il est aujourd’hui plus sollicité – et plus riche – que jamais. Retour sur une résurrection et d’autres exemples restés célèbres à Hollywood. 

Par Jean-Pascal Grosso

 

« Croyez-le ou non, mais depuis que j’ai obtenu un Oscar, à Hollywood, le seul mot que j’entends, c’est : “oui !” ». A 45 ans, Matthew McConaughey est un homme heureux. Absous le four de Sahara (2005), film d’aventure boiteux, qui, à l’époque, engloutit 130 millions de dollars et faillit faire sombrer sa carrière. Pardonnés Les Comment se faire larguer en 10 leçons  (100 millions de dollars de recette au box office américain), Playboy à saisir , Hanté par ses ex, ces « romcom » sans grand relief qui égratignèrent son image dans les années 2000.

A l’époque – tout le monde à Hollywood doit feindre de l’avoir oublié –, l’acteur passait pour un bellâtre un peu dinde, avec son accent d’Austin, Texas, à couper au couteau Bowie et ses abdominaux sculptés entre potes (Jake Gyllenhaal et le désormais honni Lance Armstrong) pour le grand bonheur des paparazzi de la côte Ouest et des lectrices de feuilles de chou. Non que Matthew ait jamais risqué de se retrouver fauché – il est, depuis ses débuts, passé maître en matière de « branding » –, mais à l’aune de sa fortune actuelle, les cachets de The Wedding Planner (Un mariage trop parfait, en VF) en 2001 (5 millions de dollars) ou de Sahara (8 millions de dollars) sont, limite, à passer aujourd’hui pour un peu maigres.

L’amour du risque

Rien qu’entre 2013 et 2014, selon le magazine Forbes, Matthew McConaughey aurait amassé la somme (astronomique) de 96 millions de dollars, soit un bond de 60 % par rapport à ses revenus de 2012 ! Toujours selon cette grande référence économique américaine, sa fortune s’élèverait aujourd’hui à 275 millions de dollars. Sa carrière a débuté en 1994 avec un film sportif, une spécialité US, Angels : une équipe aux anges. Cachet : 48 500 dollars. Has been en 2010 (il ne tourne d’ailleurs rien cette année-là), l’acteur revient en 2011 avec un thriller élégant inspiré d’un roman de Michael Connelly, La Défense Lincoln. En promotion en France, il déclare alors, remonté à bloc, vouloir « se faire peur » et « prendre des risques » dans une carrière qu’à peu près tout le monde considère comme ronflante.

Ce n’est pourtant pas un acteur malheureux. En 2008, il s’offre même le luxe de refuser le faramineux cachet de 15 millions de dollars que lui propose Universal pour incarner Thomas Magnum, le privé en Ferrari 308 GTS incarné à la télévision par Tom Selleck, pour une adaptation sur grand écran rapidement abandonnée. Lui a envie d’autre chose. Et cette transformation passera par Killer Joe, conte cruel signé William Friedkin, une composition trash dans Paperboy, de Lee Daniels, le naturaliste Mud, Sur les rives du Mississippi, de Jeff Nichols ou encore Magic Mike, de Steven Soderbergh, où, stripteaseur, il s’éclate en compagnie de Channing Tatum. « Très consciencieusement, expliquait Robbie Brenner, le producteur de Dallas Buyers Club, au Hollywood Reporter, il a décidé de changer de carrière. Et cela a fonctionné hors de toute commune mesure. »

Pour le film de Jean-Marc Vallée, dans lequel il incarne un champion de rodéo atteint du sida qui décide de se soigner et de soigner les autres par ses propres moyens, Matthew McConaughey accepte un cachet de 200 000 dollars plus un pourcentage. Il perd 20 kilos pour le rôle mais, en retour, gagnera l’Oscar 2014 du meilleur acteur, pesant désormais de tout son poids sur le marché des acteurs les plus « bankable » de la planète. Avec un budget de 5 millions de dollars, Dallas Buyers Club en rapportera plus de 55 millions à travers le monde. Une excellente affaire pour un « petit » film indépendant. Ajouté à sa prestation dans l’excellente série True Detective, tourné dans la foulée, le nouvel enfant chéri de Hollywood aura gagné en quelques mois près de 20 millions de dollars.

Matthew-4

Sans oublier sa participation à une nouvelle campagne, en élégant noir et blanc et réalisée par Martin Scorsese s’il vous plaît, pour Dolce & Gabbana, marque à laquelle il est associé depuis 2007. Difficile d’avoir le montant de l’accord entre l’acteur et la grande maison milanaise, mais McConaughey le confesse : « Il y a un très beau chèque à la fin. Je ne vais pas éluder l’aspect financier de tout, bien que je n’aurais jamais accepté de traiter avec une marque qui ne plaise pas, dans laquelle je ne me retrouve pas. Chacun y trouve son compte. » On retrouve également son nom dans la création d’une griffe de vêtements baptisée « Just Keep Livin » en 2008. Dernière anecdote : à la naissance de son premier enfant, Levi, qu’il a eu avec le mannequin Camila Alves, il vend les photos du couple et du nouveau-né au magazine people Ok ! pour 3 millions de dollars ; une somme reversée à son association « J K Livin’ » qui vient en aide à la jeunesse texane désœuvrée. Assurément, le mec est un malin.

Retour(s) en force

Encore récemment, un autre comédien a vu sa côte remonter en flèche alors qu’à peu près tout le monde à Los Angeles lui prédisait une fin funeste. En avril 2001, après avoir été retrouvé errant, défoncé, dans une rue de Los Angeles, Robert Downey Jr. se fait renvoyer de la série Ally McBeal par son producteur David E. Kelley. Après une succession d’arrestations pour – faites votre choix – port d’arme illégal, conduite en état d’ivresse, possession de stupéfiant, etc., le comédien est au creux de la vague. Son destin semble scellé. Sur The Singing Detective, avec Mel Gibson (2003), les compagnies d’assurance vont même jusqu’à refuser de le prendre en charge tant sont « pedigree » est lourd. En 2005, sur le film Game 6 de Michael Hoffman, sur un scénario de Don DeLillo, l’acteur ne touche que 100 dollars de cachet par jour de tournage. « J’avais l’impression d’être le vétéran d’une guerre dont je ne pouvais parler à personne », se souvient-il.

Et puis, en 2005, changement radical ; il vient d’être engagé pour jouer Tony Stark alias Iron Man au moment où les franchises Marvel sont sur le point d’exploser à l’écran. Il l’explique à l’époque à L’Optimum lors d’une rencontre au Festival de Deauville : « J’appartiens désormais à la Marvel ! » Downey Jr. ajoute : « Je me suis préparé au rôle avec une telle intensité que personne d’autre n’aurait pu faire un meilleur boulot. » Pour le premier Iron Man, il touche un chèque de 500 000 dollars. Pour le second, 10 millions. Et au troisième opus, 50 millions. Il encaissera 70 à 80 millions de dollars pour revêtir son armure dans Avengers, le blockbuster « choral » (1 milliard de dollars de recettes mondiales) de Joss Whedon. « Je suis tellement bourré de pognon aujourd’hui, ironise-t-il, que j’ai du mal à y croire ! »

Parmi les autres come-back retentissants de ces dernières décennies, on peut aussi parler de John Travolta qui, après Pulp Fiction (1994), est passé de 150 000 $ de cachet à une moyenne de 20 millions pour des films aussi peu mémorables que Préjudice (1998) de Steven Zaillian ou Le Bon numéro (2000) de Nora Ephron. Un retour en grâce qui permettra à la star de La Fièvre du samedi soir et Allo maman, ici bébé de devenir ambassadeur Breitling et de la compagnie aérienne australienne Qantas. Après avoir perdu « sa maison, sa femme, sa crédibilité, son entourage », Mickey Rourke revient sur le devant de la scène avec son rôle de catcheur déchu dans The Wrestler (2008) de Darren Aronofsky. L’année suivante, il apparaît, avec sa finesse habituelle, dans un spot pour une bière batave sans alcool  : « Hey, man, give me a fucking beer ! »

Les temps ont donc changé où le Tout-Hollywood allait, un peu honteux, gonfler ses revenus au pays du Soleil-Levant dans des spots azimutés signés de grands noms comme Spike Jonze. L’heure est désormais au « marketing scénarisé » et, surtout, hautement rentable. Ça, Matthew McConaughey l’a bien compris : il vient de signer un deal très fructueux avec la compagnie automobile Lincoln pour une série de spots à venir, dont le premier, signé par un Nicolas Winding Refn (Drive) sous influence True Detective, a été raillé par Jim Carrey ou Ellen DeGeneres. Des moqueries, la star texane s’en fiche : « La publicité, j’en fais depuis des années. Non seulement, ça a permis à moi et ma famille de vivre l’esprit tranquille, mais aussi d’orienter ma carrière vers des projets plus personnels. » Ce qui lui a définitivement réussi.

Matthew-1

Entre deux avions, l’acteur a répondu à nos questions…

L’Optimum : Quel est votre définition du style ? Qui est votre mentor en la matière ?
Matthew McConaughey : Etre fidèle à ce qu’on est, ne pas essayer d’être quelqu’un d’autre. En grandissant, mon frère Pat était mon icône de mode. Qui de mieux qu’un grand frère cool à admirer ?

Les vêtements reflètent-ils la personnalité ou est-ce un cliché ?
Je ne prends pas les vêtements trop au sérieux. Je ne veux pas donner l’impression que quelqu’un m’a déguisé, je veux être à l’aise et me ressembler.

Est-ce que certains des personnages que vous avez incarnés ont influencé votre style ?
Pas vraiment mais Wooderson (le personnage culte de Dazed & Confused, qui a révélé McConaughey en 1993, ndlr) a un sens du style unique.

Pouvez-vous décrire la relation que vous entretenez avec Domenico Dolce et Stefano Gabbana ?
Dolce & Gabbana est une maison iconique, je porte souvent leurs créations. J’adore la coupe de leurs vêtements. Beaucoup de marques aujourd’hui privilégient les tailles basses ou des coupes serrées. Celles de Dolce & Gabbana sont parfaites.

Ce vous faites avec eux prolonge-t-il votre travail ?
Pour moi, ce n’est pas un effort. J’aime la marque, leurs vêtements, qui reflètent ma personnalité, à l’image de leur parfum, le dernier The One for men, dont je suis l’ambassadeur.

Avez-vous l’impression d’être quelqu’un d’autre lorsque vous êtes en tenue de soirée ?
Je fais attention à mon allure, et j’aime bien me saper lorsque l’occasion s’y prête.

Faîtes-vous partie de ceux qui ont une marque fétiche de jeans ? Avez-vous des vêtements porte-bonheur ?
J’aime un bon Wrangler, j’ai aussi un J Brand que j’use pas mal ces jours-ci… Ce qui m’importe, c’est que ça m’aille… Aussi simple que ça.

Avez-vous conscience de votre image publique ? En jouez-vous ?
Même si je suis conscient qu’il y a des appareils photos ou des caméras, cela n’affecte nullement la façon dont je mène ma vie.

Comment restez-vous proche de vos racines texanes tout en étant un acteur majeur d’Hollywood ?
Je rentre au Texas…

La célébrité rend-elle les choses plus faciles ?
Elle donne les moyens de faciliter la vie, c’est certain. Mais comme toutes les médailles, elle a son revers.

Quel est votre plus grand luxe ?
Un peu de tranquillité et un verre de vin.

Combien de temps consacrez-vous à gérer vos affaires ?
L’équilibre entre le travail et la vie de famille est délicat…

Avez-vous l’impression d’avoir plus de pouvoir que jamais ?
C’est la paternité qui m’a donné ce sentiment.

Si vous aviez une deuxième chance, que feriez-vous différemment ? 
Rien, la vie est un voyage.


Matthew McConaughey en chiffres:

24 années de carrière

51 films ou séries

1 Golden Globe (2014)

1 Oscar (2014)

19 M$ : salaire estimé (2013)

132 M$ rafflés dès le premier week-end par Interstellar

Son plus gros succès: Le Loup de Wall Street (2013): 391 976 723$

A refusé 15M$ pour une adaptation de Magnum


Sur le même thème

Votre avis nous interesse