Sport Le 08/10/2015 par Sebastien Nouet

Rencontre avec Marco Verratti

Il est l’un des plus grands espoirs du football mondial. Virevoltant, combattant, passionné… Le chouchou du Parc des Princes est aussi un joueur respecté, même par les supporters des adversaires du PSG. Rencontre avec le plus italien des Parisiens et le plus parisien des Italiens. Interviewer un joueur de football n’est jamais une sinécure. En particulier quand on aime le football. Entre langue de bois, caprices de diva, retards et moue boudeuse, on est souvent déçu. Et puis, parfois, on a la chance de tomber sur un homme comme Marco Verratti. L’égérie Puma arrive en avance au rendez-vous, se plie de bonne grâce à la séance de maquillage et aux essayages, prend la pose sans rechigner et affiche un sourire au naturel désarmant sur son visage – lequel aurait eu sa place au cœur des chefs-d’œuvre de la Renaissance italienne.

Des supporters de l’OM viennent au Parc des Princes rien que pour voir jouer Marco Verratti. Parce qu’il respire le football et qu’il est ce que ce sport fait de mieux. Quand on le rencontre, on comprend mieux pourquoi ce joueur inspire le respect chez tous les passionnés de ballon rond. Interviewer Marco Verratti est une chose simple. Car si sur le terrain, c’est un artiste, dans la vraie vie, c’est un juste un homme bien…

 

L’Optimum : Qu’y a-t-il d’italien dans votre football ?
Marco Verratti : Je me sens très, très italien dans le jeu ! Je suis plutôt technique et j’aime les beaux gestes. Mais j’aime aussi récupérer les ballons et relancer. Pour bien attaquer, il faut savoir défendre. Je prends un réel plaisir à sentir que je suis au bon endroit parce que j’ai travaillé ces séquences de jeu à l’entraînement. Dans le football moderne, certaines équipes ne pensent pas toujours à défendre. Moi, je me sens italien car je n’oublie jamais de défendre ! Mais je n’oublie pas non plus d’attaquer et, maintenant, tous mes compatriotes savent qu’il ne suffit pas de défendre. Etre un footballeur d’aujourd’hui, c’est ça : défendre et attaquer, attaquer et défendre. Le football est total et je suis un Italien total (rires) !

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Quelle est la différence fondamentale entre le football italien et le football français ?
Le football italien est très tactique, et c’est pour ça que c’est très dur à jouer pour toutes les équipes étrangères. En équipe nationale, c’est la même chose, on travaille beaucoup les mises en place à l’entraînement. En France, ce travail n’est pas systématique. Les entraînements sont très différents, on mise davantage sur le physique. Dans le championnat de France, les joueurs sont plus libres, alors qu’en Italie, le terrain est quadrillé, vous avez tout de suite quelqu’un sur le dos. En Italie, les amateurs de foot aiment le jeu pur, mais aussi la tactique, car cela fait partie de notre culture.

A votre arrivée au PSG, vous étiez très impulsif et vous étiez souvent averti par les arbitres…
Ça, on peut dire que c’était un de mes défauts d’Italien (rires) ! Sur le terrain ou dans la vie, quand je vois une chose que je ne trouve pas juste, c’est difficile pour moi de ne rien dire. Alors quand un arbitre prenait une décision que je trouvais injuste, je m’emportais un peu trop (rires). Ce n’était pas tout à fait de ma faute, car en Italie, le rapport avec l’arbitre est vraiment différent. Les joueurs lui parlent beaucoup et il l’accepte. Quand je suis arrivé en France, j’ai continué à leur parler. Mais ici, les arbitres n’aiment pas trop ça et j’ai pris pas mal de cartons. Avec le temps, j’ai appris à être un peu plus diplomate. J’ai compris que lorsque je parlais trop, cela envenimait la situation. Alors je prends sur moi et je discute moins les choix de l’arbitre.

Renier votre nature et votre caractère aurait pu changer votre style de jeu…
Cela n’a pas changé ma rage de vaincre. J’ai juste ajusté une ou deux choses, j’ai mis encore plus d’influx dans mes actions et j’apprends à gérer mes émotions sur le terrain. Je mûris, quoi… Je parle moins et je joue plus ! Mais mon implication dans le jeu et mon sens du sacrifice sont toujours là.

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Qui sont vos modèles ?
J’apprends de tous les grands joueurs que je côtoie au quotidien dans le vestiaire du PSG. Dans le foot italien, mes modèles sont Del Piero et Pirlo. Jouer avec Pirlo en équipe nationale a été un rêve pour moi. J’ai beaucoup appris en le regardant, pendant les matchs, pendant les entraînements mais aussi pendant les rassemblements de la Squadra Azzurra. Avant, je le voyais à la télé et je l’adorais. Quand je me suis retrouvé à côté de lui, lors de ma première convocation en sélection, j’ai vécu un moment inoubliable. C’est un génie, mais il reste humble. Auprès de ces immenses joueurs, on gagne un temps fou, à condition, bien entendu, de les écouter et de prendre tout ce qu’ils vous donnent.

Au quotidien, qu’y a-t-il de profondément italien en vous ?
Dans la vie de tous les jours, je me sens italien à 100 %. Mais on peut toujours s’améliorer. Je suis né en Italie et je serai toujours un Italien mais j’apprends beaucoup de ma vie en France. Il y a des choses que j’aime en France et qui ont une influence sur moi. Mais mon éducation et la culture de mon pays m’ont profondément marqué. Pour la nourriture, je suis par exemple 100 % italien (rires) ! Dans le caractère aussi. Je suis « chaud » comme un Italien, au sens « chaleureux » du terme. En France, je trouve que les gens sont un peu plus froids. Un Italien peut par exemple rencontrer quelqu’un et s’en faire immédiatement un ami pour la vie. Je suis comme ça. Alors que les Français sont plus méfiants, attendent davantage avant de donner leur amitié. J’espère transmettre ce côté chaleureux à mes amis français et les faire devenir un peu italiens. Je prends d’eux, je leur donne, c’est ça l’Italie !

Cette chaleur et cette passion est donc très « italienne » chez vous…
La passion n’est pas une chose seulement italienne, heureusement ! Le football est, par exemple, une passion qui anime les fans de tous les pays du monde et c’est une chose très importante pour moi. C’est sans doute pour cela que je trouve tout à fait normal que les supporters nous mettent « la pression » car nous, les joueurs, nous avons une chance folle ! Tant de personnes voudraient être à notre place, notre vie est si belle que nous devons nous battre sur tous les ballons et mouiller le maillot pendant les matchs. Mais nous devons aussi être irréprochables en dehors du terrain car nous sommes parfois des exemples, en particulier pour les enfants. Ce métier nous apporte beaucoup et nous devons donc rendre aux supporters un peu de l’immense bonheur qu’ils nous offrent. Je comprends cette passion, car je suis toujours supporter de Pescara. C’est ma ville, le club où j’ai joué pendant dix ans, le stade est à côté de ma maison d’enfance, c’est ma vie. C’est la ville où je suis né et je ne la changerai jamais, même avec Paris qui est sans doute dix fois plus jolie. Mais pour un Italien comme moi, la ville où je suis né restera toujours dans mes veines.

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Et côté mode ?
Tous les Italiens aiment la mode, non ? (rires). Je pense que la mode doit être une chose différente pour chaque individu et ne pas être uniforme. Ce que tu mets sur toi reflète une partie de ta personnalité, donc je n’ai pas envie d’être habillé comme tout le monde. J’aime les belles pièces, les beaux tissus, les jolies coupes, bref, j’aime la mode, mais je ne la suis pas toujours au pied de la lettre car je veux avant tout rester moi-même.

Côté tatouages, en revanche, vous suivez la mode des footballeurs…
C’est vrai que beaucoup de joueurs sont tatoués mais le tatouage est vraiment une chose très personnelle puisque aucun tatouage ne ressemble à un autre ! C’est un tatoueur napolitain qui vient à Paris faire les miens. C’est Lavezzi, mon grand ami du Paris Saint-Germain, qui me l’a présenté. Les tatouages représentent des étapes fortes de ma vie que j’aime marquer dans ma chair. Comme une marque indélébile pour ne jamais rien oublier.

Vous vous êtes très vite et très bien adapté à Paris…
Dans mon travail, mais aussi dans ma vie quotidienne, quand je suis arrivé ici, tout le monde m’a bien accueilli. Je n’ai jamais eu le mal du pays car au PSG, si tu fais bien ton job, on t’aide et on te respecte. La première année, on parlait beaucoup italien dans le vestiaire, alors je n’ai pas beaucoup progressé en français. Mais maintenant, je me débrouille bien. J’ai des amis parisiens, j’aime ce club et cette ville, il était très important pour moi d’apprendre la langue pour m’intégrer au mieux. Je suis un Parisien. Un Italien parisien, mais un Parisien !

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La Squadra est une chose très importante pour vous…
C’est quelque chose de primordial. Pour un footballeur, jouer pour son pays est la chose la plus forte, la plus fantastique. On représente son drapeau, son pays, toute la nation est derrière toi, il n’y a rien de plus fort.

J’imagine que la Coupe du monde 2014 a dû être difficile pour vous…
Pour moi, cette compétition a été un moment très étrange car c’est un mélange de joie et de peine. C’est une chose incroyable de faire une Coupe du monde, j’étais fou de joie d’y participer. Mais sortir comme ça, au premier tour, ce n’était pas joli. C’était un drôle de mix comme expérience, mais je ne veux garder que le positif et prendre une revanche lors de l’Euro 2016 !

Vous préférez gagner la Champions League avec le PSG ou l’Euro avec l’Italie ?
Pourquoi choisir, je veux les deux (rires) ! Une ligue de champions, c’est la victoire d’un groupe de copains et ça doit être très fort. En club, tu passes plus de temps avec tes coéquipiers qu’avec ta famille, du coup la victoire se partage vraiment et ça doit être très fort. Ça doit être inoubliable car tu l’as fait avec tes potes, tu as lutté pendant toute une saison pour y arriver. Mais un trophée avec l’équipe nationale, ça doit aussi être incroyable car tout ton pays est derrière toi et tu entres dans l’histoire de ton pays. Je suis parisien et italien, j’ai envie des deux (rires) !

 

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