Sport Le 11/01/2017 par La rédaction

Business : rencontre avec 6 « sport angels »

Agents sportifs, conseillers, publicitaires, avocats en droit du sport… on ne compte plus les jeunes diplômés qui se lancent dans le business. Normal, les sports de haut niveau ont pris une telle ampleur – sociétale, médiatique, financière – qu’ils sont devenus le terrain de jeu favori d’une nouvelle génération d’hommes d’affaires. Rencontre avec ceux qui ont donné le coup d’envoi.

Par Anne Gaffié

Stéphane Dray, 36 ans, agent sportif, fondateur et gérant de Sport Development & Management

Dray

Quel est votre parcours ?

Joueur de basket en national jeunes, rugbyman amateur, avant de me mettre au triathlon, l’exutoire idéal ! Diplômé de Paris-Dauphine, en économie et gestion du sport, avec un master 2 pro en contrôle de gestion, je suis actuellement une formation continue en master 2 pro droit du sport à l’université d’Aix-Marseille.

Votre challenge du moment ?

Un projet de formation pour sportifs de haut niveau en reconversion, en partenariat avec de gros sponsors du rugby et une grande école de commerce.

L’affaire dont vous êtes le plus fier ?

Réussir à accompagner un joueur dans un choix de carrière pertinent.

Et celle de référence ?

Le contrat de Dan Carter au Racing Metro. J’imagine un contrat permettant au joueur d’être intéressé à la progression « commerciale » du club (merchandising, sponsoring, billetterie, etc.).

L’avenir de votre profession ?

Il est important de travailler l’image du sportif professionnel, le « celebrity marketing ». L’aspect juridique prendra une place prépondérante, les contentieux se développant de plus en plus. L’agent doit l’anticiper pour éviter au sportif, et au club, d’évoluer dans un climat peu propice à la performance.
Autre enjeu, le patrimoine. Il faut filtrer et gérer la situation financière d’un sportif.

Le champion mythique dont vous auriez aimé gérer la carrière ?

Michael Jordan.

Peut-on être encore supporter lorsqu’il faut traiter avec tous les clubs ?

Oui ! Je n’oublie pas mon enfance parisienne et les clubs que j’ai suivis.

Votre amour du sport a-t-il déjà été remis en cause par la réalité du métier ?

J’ai appris à faire la part des choses. Ce qui se passe dans le vestiaire reste dans le vestiaire.


Sylvain Ventre, 33 ans, publicitaire, cofondateur et associé de l’agence Willie Beamen

ventre

Quel est votre parcours ?

Après une carrière de joueur professionnel de handball, j’ai intégré l’Essec Paris. Diplômé d’un mastère en marketing international, j’ai rejoint Romain Collinet chez Lagardère Unlimited comme Athletes Marketing Manager, avant de le suivre chez Willie Beamen.

Votre challenge du moment ?

Nous positionner davantage comme une agence de publicité, afin d’aider les marques à prendre la parole dans le sport et l’entertainment, et à contrôler la production de contenus et donc l’image des athlètes.

L’affaire dont vous êtes le plus fier ?

Celle du moment, la mise en place d’une campagne globale (conception, production, activation) pour la marque Withings. Avec un premier film tourné récemment au Texas avec le basketteur Boris Diaw, puis un second en projet avec un grand DJ, prévu pour le marché asiatique.

Et celle de référence ?

Les contre-pieds, comme Mohamed Ali pour Louis Vuitton.

Le champion mythique dont vous auriez aimé gérer la carrière ou l’image ?

Mohammed Ali en combat à Kinshasa ! « Float like a butterfly, sting like a bee. The hands can’t hit what
the eyes can’t see. »
Une campagne à lui tout seul !

Le sport contemporain serait-il le même sans considérations financières ?

Oui, son ADN fait de défis et de victoires reste finalement le même, et les athlètes contemporains sont toujours les dieux du stade.

Peut-on être encore supporter lorsqu’il faut traiter avec tous les clubs ?

Entre affinités et objectivité, notre cœur balance.


Sidney Broutinovski, 29 ans, fondateur et directeur de l’EAJF, directeur général du cabinet 11 De Légende

Sidney

Votre parcours ?

Dix ans de natation, puis de tennis, football américain et boxe thaï ! Ancien conseiller immobilier à la tête d’un cabinet de gestion de patrimoine, j’ai créé l’école en 2009, puis en 2013 sa junior entreprise, un cabinet d’agent sportifs.

Votre challenge du moment ?

Lutter contre la dérégulation de la profession d’agent sportif décidée récemment par la Fifa. Cette décision va à l’encontre des mesures engagées par l’Union européenne, et de nombreuses dérives sont à craindre.

L’affaire dont vous êtes le plus fier ?

L’ouverture de quatre écoles en France, acces-sibles à tous, avec une formation qualitative.

Et celle de référence ?

Le transfert de l’incroyable Luis Suarez du Liverpool FC au FC Barcelone. Il marque 31 buts lors de sa saison à Liverpool, part à la Coupe du monde, mord (c’est la 3e fois) le défenseur Giorgio Chiellini, est suspendu quatre mois par la Fifa, transféré lors du mercato pour 80 millions d’euros malgré une chute de popularité, et joue la finale de Ligue des champions cette année. Le tout en moins de douze mois !

L’avenir de votre profession ?

Plus d’argent, moins de liberté. Et la surmédiatisation n’a pas aidé. Le football est un sport populaire, il faut le protéger.

Le champion mythique dont vous auriez aimé gérer la carrière ?

L’inégalable Michael « His Airness » Jordan.

Peut-on être encore supporter lorsqu’il faut traiter avec tous les clubs ?

Les deux ne sont pas incompatibles, puisque faits d’une même passion pour le sport.

Votre amour du sport a-t-il déjà été remis en cause par la réalité du métier ?

Jamais. Contrairement à l’image que renvoient certains de ses dirigeants, comme Sepp Blatter. Je veux garder en tête que le sport est une vitrine renvoyant à des valeurs positives.


Romain Collinet, 33 ans, publicitaire, cofondateur et président de l’agence Willie Beamen

Collinet

Quel est votre parcours ?

Ancien rugbyman du Stade français, diplômé d’une maîtrise de droit privé et d’un mastère
en marketing international de l’Essec, passé par l’agence Havas Sports & Entertainment avant de cofonder l’agence Sporteam, vendue depuis à Lagardère Unlimited, puis de lancer Willie Beamen avec Sylvain Ventre, Nicolas de Fautereau et Sébastien Petit-Jean.

Votre challenge du moment ?

Renforcer notre positionnement sur le marketing et l’entertainment.

L’affaire dont vous êtes le plus fier ?

Avoir élargi à 360° notre domaine d’intervention auprès de marques comme Dim. La « Dim Team » c’est nous, une plate-forme d’endorsement composée de rugbymen français.

Et celle de référence ?

L’idée originale de Sébastien Petit-Jean, démocratisée depuis, qui en 2009 a inventé le partenariat « PMU-Stade français Paris » avec son fameux « Canapé PMU » au bord du terrain.

L’avenir de votre profession ?

Le sport de haut niveau est devenu un sujet de société, ultramédiatisé. Il renvoie à des enjeux d’égalité, d’éducation, des questions de santé et d’économie. Et les investisseurs vont être de plus en plus nombreux.

Le champion mythique dont vous auriez aimé gérer la carrière ?

Michael Jordan, qui a repoussé les frontières du sport business en incarnant à lui seul le développement du basket-ball au niveau mondial.

Peut-on être encore supporter lorsqu’il faut traiter avec tous les clubs ?

Oui ! En sport, le cœur a ses raisons que la raison ignore.

Votre amour du sport a-t-il déjà été remis en cause par la réalité du métier ?

Jamais. C’est un milieu où il faut savoir dissocier passion et travail, et garder en tête qu’un homme peut en cacher un autre.


Neal Lachmany, 39 ans, avocat en droit des affaires et droit du sport chez Taylor Wessing

Neal

Quel est votre parcours ?

Mon parcours sportif s’est limité à un niveau régional jeunes, mais je⁄ne conçois pas ma vie sans pratique régulière du sport. Titulaire d’une maîtrise et d’un 3e cycle en droit des affaires, j’ai d’abord travaillé chez IMG à Paris et à Sydney, puis chez Taylor Wessing, où je défends les intérêts de clients de l’univers du sport et des médias.

Votre challenge du moment ?

La Mouratoglou Tennis Academy. Fin 2014, j’ai accompagné l’ISP, située à Biot, pour la cession de la société au groupe Mouratoglou. Aujourd’hui, je participe à la mise en place de la plus grande académie de tennis d’Europe. Industrie du sport, vision entrepreneuriale, stratégie et expertise juridique. Tout y est.

L’affaire dont vous êtes le plus fier ?

La prochaine.

Et celle de référence à vos yeux ?

Le MMArena, premier contrat de naming d’une enceinte sportive en France.

Le champion mythique dont vous auriez aimé gérer la carrière ou l’image ?

Jimmy Connors.

Le sport contemporain serait-il le même sans considérations financières ?

Non. Le nombre d’emplois directs et indirects généré par le sport est considérable. Reste le problème des abus liés à l’avidité de certains acteurs (et on le voit bien avec le scandale de la Fifa), mais ce n’est pas propre au sport.

Peut-on encore être supporter lorsqu’il faut traiter avec tous les clubs ?

En tant qu’avocat, on apprend vite à avoir une vision assez « froide ». En aucun cas nous ne devons être « supporters ».

Votre amour du sport a-t-il déjà été remis en cause par la réalité du métier ?

L’envers du décor amène parfois à relativiser. Mais le plaisir reste entier.


Kévin Hautcoeur, 30 ans, conseiller sportif, cofondateur de Projet Elite

Hautcoeur

Quel est votre parcours ?

Ancien international sur 800 m, pendant dix ans, record de France jeune, champion de France, puis d’Europe, finaliste mondial … Avec un bac +2 en poche, j’ai créé Projet Elite avec Olivier Thomas.

L’affaire dont vous êtes le plus fier ?

Celle d’un de mes jeunes joueurs du FC Nantes, viré par son club. Sur un lit d’hôpital après une opération des croisés, il croyait ne plus jamais jouer. Il vient de retrouver un club pro.

L’avenir de votre profession ?

Excellent. Le milieu sportif prend peu à peu conscience qu’il faut savoir gérer sa com’, et non la subir. La sur-médiatisation est une arme terrible pour faire et défaire une carrière. Anna Kournikova, Yoann Gourcuff, en sont des exemples flagrants.

Le champion mythique dont vous auriez aimé gérer la carrière ou l’image ?

Mohamed Ali. Pas facile à gérer, avec une personnalité et une carrière hors-norme, mais j’aurais aimé
relever le défi.

Le sport contemporain serait-il le même sans considérations financières ?

Impossible. Alors évidemment, on n’en connaîtrait pas toutes les dérives – dopage, corruption, récupération – mais il n’y aurait pas non plus cette ferveur mondiale et sociale qui l’anime.

Peut-on être encore supporter lorsqu’il faut traiter avec tous les clubs ?

Oui, mais il ne faut surtout pas que ça se sache !

Votre amour du sport a-t-il déjà été remis en cause par la réalité du métier ?

Jamais. Il faut être lucide, ce n’est pas un milieu facile, avec ses enjeux, sa stratégie, mais l’envers du décor fait partie du sport.

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